Balade guidée dans l’architecture périgourdine du village de Castelnaud-La-Chapelle

28 juin 2025

Entre pierre et lumière : l’âme du bâti périgourdin à Castelnaud-La-Chapelle

À Castelnaud-La-Chapelle, l’architecture ne se contente pas d’habiller le paysage : elle en est l’un des personnages principaux. Ce bourg du Périgord Noir, situé au confluent de la Dordogne et du Céou, fait partie de ces villages où chaque pierre, chaque toit, raconte plusieurs siècles d’histoire. L’habitat, ici, n’est pas figé : il vit, évolue, s’adapte. Entre châteaux de légende et maisons de paysans, la visite des ruelles du village offre un condensé rare de l’architecture traditionnelle périgourdine.

Mais où, précisément, peut-on l’admirer ? Quels sont les signes distinctifs à reconnaître ? Et quelles histoires s’y cachent ? Pour mieux s’orienter, cette promenade architecturale commence au cœur du village médiéval, serpente entre maisons à colombages, pigeonniers et granges, et s’aventure même jusque dans les faubourgs.

Comprendre l’architecture périgourdine : matériaux, techniques et spécificités

Avant de partir en exploration, quelques repères sur ce qui fait l’essence du bâti local. L’architecture périgourdine est une architecture vernaculaire, c’est-à-dire née des ressources, du climat et de la culture du territoire.

  • La pierre calcaire blonde : matériau fétiche du Sarladais, elle donne aux façades leur teinte dorée, presque lumineuse. Facile à extraire dans les carrières alentours (près de Beynac, Domme ou Saint-Cybranet), elle se taille aisément et possède une excellente inertie thermique.
  • Les toitures à forte pente : tradition locale héritée du Moyen Âge, qui permet la bonne évacuation des pluies. Leur recouvrement avec des “lauzes” (dalles calcaires) ou avec des tuiles plates creuses (tuiles canal) forge la silhouette inimitable des villages.
  • Les encadrements de fenêtres et portes « en pierre de taille » témoignent du savoir-faire des artisans-maçons.
  • Les pigeonniers et clochetons, autrefois emblèmes de prospérité, sont souvent intégrés aux maisons ou aux granges.
  • Les escaliers extérieurs et balets, ces auvents abritant le seuil, permettaient de travailler à l’abri du soleil, et d’entrer de plain-pied à l’étage.

Selon les chercheurs du service de l’Inventaire du Patrimoine Nouvelle-Aquitaine, ces caractéristiques sont le fruit d’une adaptation millénaire aux contraintes du sol, du climat, des ressources et de la vie rurale.

Lieux emblématiques à ne pas manquer à Castelnaud-La-Chapelle

Le cœur médiéval et ses ruelles : immersion dans la carte postale périgourdine

La zone la plus spectaculaire pour découvrir l’architecture traditionnelle se situe sur la montée vers le château, à partir du pont sur la Dordogne.

  • La « Grande Rue » : artère pavée du village ancien, elle concentre une grande partie des maisons du XVe au XVIIIe siècle, parfaitement mises en valeur après une restauration exemplaire lancée dès les années 1980 (source : Patrimoine & Inventaire Nouvelle-Aquitaine).
  • Les maisons à pans de bois : au numéro 18, observez la structure en colombages remplie de torchis, témoin rare dans une région plutôt réputée pour la pierre. Au début du XXe siècle, il ne restait qu’une dizaine de maisons à pans de bois dans tout le canton.
  • Les passages voûtés : ces arches reliant parfois deux habitations protégeaient du soleil ou de la pluie et permettaient d’accéder directement d’une dépendance à l’autre.
  • L’ancien four communal, restauré et visible depuis la rue, rappelle l’ancrage de chaque quartier autour de ces équipements collectifs.

Le château de Castelnaud : la forteresse et ses dépendances

Impossible d’évoquer Castelnaud sans son château médiéval. La forteresse, fondée au XIIe siècle (première mention en 1214), est le cœur monumental du village. Si ses murs massifs impressionnent, son rôle a largement dépassé le militaire, et on y observe :

  • Des remparts en pierres sèches typiques du Périgord Noir
  • Deux logis restaurés avec leurs fenêtres à meneaux et toits en lauzes (dalles calcaires taillées plus de 10 cm d’épaisseur !)
  • Un spectaculaire donjon carré sur voûte d’ogives et escalier à vis
  • Des communs et granges réhabilités dans le plus pur style périgourdin : murs épais, petites ouvertures, toitures pentues

Le château fut l’un des premiers du Périgord à rouvrir au public après la Seconde Guerre mondiale (dès 1966), et reste un modèle de restauration du patrimoine (source : chateau-castelnaud.com).

L’église Saint-Michel-Archange : robustesse romane et détails d’époque

Située au sommet du village, l’église frappe par sa simplicité massive. Son chœur roman (XIIe siècle) et son clocher-mur représentant un rare exemple de clocher à peigne régional. À noter :

  • Les arcs en plein cintre, caractéristique du roman périgourdin
  • La voûte en berceau brisé, remarquable par sa conservation sans remaniement majeur depuis 800 ans
  • Les petites ouvertures en meurtrières qui laissaient entrer la lumière tout en gardant la fraîcheur

Patrimoine rural autour du village : bourrines, fermes et pigeonniers

En dehors du centre bourg, quelques trésors de l’architecture périgourdine se nichent dans les hameaux, sur les chemins ou les rives.

  • La « Borie » de la Font du Roc : petit abri en pierre sèche utilisé par les cultivateurs, témoin des techniques paysannes d’autrefois.
  • Le pigeonnier du Cros : typique de la Dordogne rurale, perché sur piliers appelés « pieds-de-mulet », il servait à stocker grain et fientes, mais aussi à affirmer le statut social du propriétaire.
  • La ferme du Clédou, construite entièrement en pierre de pays au XVIIe siècle : remarquable pour son toit en lauzes classé. À noter, la technique de pose sans mortier, simple superposition et ajustement par taille séculaire.
  • Les granges et maisons de la Roche, blotties au milieu de murs de soutènement, où l’on distingue encore les restes d’une ancienne « fenêtre à coussiège », un banc de pierre intégré dans l’épaisseur du mur pour discuter ou guetter le chemin.

Conseils pratiques pour admirer (et photographier) l’architecture périgourdine à Castelnaud

Quelques recommandations pour profiter pleinement de la visite et ramener des images dignes d’un livre d’art :

  1. Pour la lumière idéale : parcourir la montée du village en début de matinée ou en fin d’après-midi, lorsque la pierre blonde capte les rayons rasants (astuce : après 18h, l’affluence baisse et le doré des façades est à son apogée).
  2. Pour saisir les détails : équipez-vous d’un petit carnet : chaque clé de voûte, heurtoir en fer forgé, ou imposte en pierre sculptée a son histoire.
  3. A ne pas manquer :
    • L’alignement de maisons sur la montée du château
    • Les encadrements de fenêtres en plein cintre au détour d’une ruelle cachée
    • Le pigeonnier du Cros, superbe en contre-jour matin
    • Les vieux ponts et murets de pierre sèche sur le sentier du Céou
  4. Respecter la quiétude : beaucoup de maisons sont habitées, soyez discret (et merci d’éviter selfies envahissants ou drones), le charme du village se goûte à pas feutrés !

Pour les passionnés, la mairie propose régulièrement en juillet-août des visites guidées gratuites du bourg ancien (infos en mairie ou Office de Tourisme Sarlat Périgord Noir).

Quand l’architecture se vit : festivals, restaurations et pépites à voir en été

Castelnaud-La-Chapelle n’est pas figée dans la carte postale. Chaque année, le patrimoine revit grâce à :

  • Les Journées du Patrimoine de Pays en juin : ouverture exceptionnelle de granges restaurées, balades guidées sur la technique de la pierre sèche, initiations à la taille de lauze (Source : Journées du Patrimoine de Pays et des Moulins, Fédération Patrimoine-Environnement).
  • Chantiers jeunes et bénévoles, chaque été : une section du GR36 longeant le village a bénéficié récemment d’un remontage traditionnel des murets, avec explications sur site (mention dans « Sud Ouest », juillet 2023).
  • Expositions photos, souvent installées à la mairie ou sous la halle, redonnent vie à certaines maisons disparues ou racontent la saga de restaurations menées par des artisans locaux.

Bon à savoir : depuis la pandémie, la demande de restauration de bâtis anciens explose en Dordogne (+40 % selon le CAUE 24), reflet d’un nouvel engouement pour l’habitat traditionnel.

Vers une architecture qui inspire et se transmet

À Castelnaud-La-Chapelle, l’architecture n’est pas simple décor : c’est l’ADN d’un territoire. Cette identité forte attire curieux, habitants et nouveaux arrivants en quête de sens, mais pose aussi la question de la transmission des savoir-faire et de l’équilibre entre préservation et adaptation à la vie d’aujourd’hui. La municipalité s’est récemment engagée dans une démarche de « Petite Cité de Caractère » pour valoriser ce patrimoine vivant, ouvrir de nouveaux parcours de découverte, et accompagner la restauration raisonnée.

L’observation des maisons du village, des détails sculptés ou des raccourcis entre cour et jardin, offre donc bien plus qu’une leçon d’architecture : c’est la promesse d’une plongée dans la mémoire et l’avenir du Périgord Noir.

Pour ceux qui veulent en voir plus : la balade se prolonge vers Marqueyssac, Beynac, ou Domme, où chaque village explore à sa façon cette alliance rare entre pierres blondes, paysages et art de vivre.

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