Secrets et singularités : le quartier du château à Castelnaud-La-Chapelle dévoilé

11 juin 2025

Un quartier, mille ans d’histoire concentrés en quelques ruelles

Au pied du puissant château de Castelnaud, dont la silhouette domine la vallée du Céou et surplombe la Dordogne, s’étend un quartier tout en harmonie. Mais plus encore que ses maisons de pierre blonde, ce sont les siècles qu’on foule à chaque pas. Le quartier du château, c’est d’abord la vieille ville, installée dès le Moyen Âge au plus près de la forteresse – pour profiter de sa protection. Selon l’inventaire du patrimoine géré par le Ministère de la Culture (Base Mérimée), la première mention avérée de Castelnaud-la-Chapelle remonte à 1214, au cœur de luttes entre seigneurs locaux, Anglais et rois de France.

Les rues — Rue du Château, Place de la Fontaine — suivent un tracé en arêtes de poisson typique du village castral, organisé autour de la défense du site. D’empilements de maisons contre la muraille jusqu’aux premières courbes du bourg, chaque pierre raconte une page parfois oubliée de l’histoire du Périgord Noir.

Des paysages de carte postale… à scruter du haut des remparts

Impossible d’aborder Castelnaud sans évoquer son panorama : la vue imprenable depuis le quartier du château fait partie des plus célèbres de Dordogne (classé “un des plus beaux villages de France” par l’association depuis 1982). Mais pourquoi ce point de vue fascine-t-il tant ?

  • Le château veille à 150 mètres d’altitude, ce qui lui permet de surveiller à la fois la vallée de la Dordogne et celle du Céou.
  • Depuis le chemin de ronde, on aperçoit Beynac, Marqueyssac, La Roque-Gageac… un condensé de patrimoine sur quelques kilomètres.
  • La lumière en fin de journée y prend une couleur dorée : la pierre calcaire s’embrase, offrant des teintes changeantes selon la saison – photographes amateurs ou confirmés en raffolent (source : Dordogne Périgord Tourisme).

Le quartier du château, un musée vivant de l’architecture périgourdine

Ce qui distingue ce quartier, ce n’est pas seulement son château : c’est un ensemble de demeures médiévales, bien préservées grâce à la protection du secteur sauvegardé instaurée en 1962. L’architecture traditionnelle domine, mêlant maison forte (la maison du Sénéchal datant du XVe siècle, repérable à ses tours d’angle), échoppes de marchands, anciens ateliers de tonneliers et “pechs” agricoles.

  • Toitures en lauze : Les lourds toits de pierre, typiques des maisons paysannes périgourdines, permettent de supporter la neige tout en conservant la fraîcheur l’été.
  • Encadrements sculptés : Déambuler dans la rue principale, c’est repérer linteaux ornés de motifs végétaux et fenêtres à meneaux du XVIe siècle.
  • Linteaux “parlants” : Certaines maisons affichent au-dessus de leur porte des dates ou symboles taillés dans la pierre, indices précieux pour les amateurs de patrimoine vernaculaire.

Parmi les curiosités : le four banal, remis en activité certains dimanches pour des démonstrations, la fontaine du XIIIe siècle (où venaient s’approvisionner les habitants en eau fraîche), et la fameuse Tarrissou, petit passage étroit qui relie le chemin de ronde à la place du marché.

Le cœur battant du village : traditions et vie locale préservées

L’âme du quartier du château, ce sont aussi ses habitants, artisans et figures locales. Environ 180 personnes vivent aujourd’hui “dans la montée”, dont quelques familles installées ici depuis plusieurs générations. Mais la vitalité n’est pas qu’un souvenir du passé :

  • Des commerces rares : une boulangerie traditionnelle alimente encore les petits-déjeuners du haut du village ; l’atelier du ferronnier, installé depuis 1985, propose poignées et heurtoirs forgés sur place.
  • Un marché les mardis matin (de mars à novembre), exclusivement consacré aux producteurs du canton : noix, miel, fromage cabécou…
  • Fête du pain et journée des vieux métiers : deux manifestations qui animent le quartier chaque année et attirent des centaines de curieux, tout en contribuant à la transmission des gestes anciens (source : Mairie de Castelnaud-La-Chapelle).

Ici, la convivialité ne relève pas du folklore touristique : les rencontres se font au coin de la petite place ou devant l’école communale, encore en activité avec une trentaine d’élèves – une fierté pour les villageois.

Ancrages, légendes et anecdotes qui font la singularité du quartier

Castelnaud, c’est aussi des histoires transmises oralement, que les guides et les vieux du village aiment à raconter lors des visites nocturnes.

  • La légende de la porte du Diable : sur la muraille ouest, une brèche mystérieuse aurait été ouverte, dit-on, par le Diable lui-même pour loger un trésor – jamais retrouvé.
  • La cloche sans battant : en 1870, des soldats prussiens traversent le village ; les habitants cachent le battant de la cloche pour empêcher les Allemands de la faire sonner – et de signaler la présence de vivres cachées dans les caves alentours.
  • Le sentier des amoureux : petit chemin caché, à droite après la porte fortifiée, il servait autrefois de raccourci discret aux jeunes du village pour se retrouver à l’abri des regards.

Ces histoires, parfois confirmées par les archives, font toute la saveur du quartier et construisent une mémoire partagée qui dépasse de loin la simple visite touristique.

Quelques adresses secrètes à ne pas manquer

  • Le jardin suspendu du château : un espace paysager réaménagé dans les remparts sud, ouvert lors des Rendez-vous aux Jardins chaque printemps (source : DRAC Nouvelle-Aquitaine).
  • L’atelier du vitrailliste : installé dans une ancienne remise du XVIe siècle, il offre des visites sur rendez-vous, pour découvrir la restauration de vitraux anciens – et parfois voir travailler un artisan au plomb.
  • L’escalier secret derrière l’église : peu connu, il offre une vue exceptionnelle sur la vallée du Céou au lever du soleil.

Le quartier du château aujourd’hui : enjeux et nouveaux défis

Préserver la singularité du quartier tout en assurant son avenir constitue un défi permanent :

  1. Le chantier permanent de restauration : Près de 120 maisons sont classées ou inscrites à l’Inventaire Supplémentaire des Monuments Historiques (source : DRAC Nouvelle-Aquitaine). La commune met l’accent sur l’utilisation de matériaux locaux et la transmission des savoir-faire.
  2. Coexistence habitat/tourisme : Plus de 250 000 visiteurs gravissent chaque année la montée jusqu’au château, soit plus de 1000 visiteurs par jour en saison estivale (chiffres : Établissement Public du Château de Castelnaud), ce qui impose parfois des adaptations pour les résidents.
  3. Préserver l’authenticité : La multiplication des gîtes et résidences secondaires pousse les habitants et la mairie à imaginer une politique de maintien des commerces de proximité et un encadrement des rénovations.

Un quartier à explorer autrement

Le quartier du château n’est pas un décor figé. Il se vit à tous les rythmes : celui des soirs d’été quand la fanfare s’installe sur la place de la Fontaine, celui d’un matin de brume quand les marches luisent sous la rosée, ou lors des grandes pluies de printemps qui font déborder les jardins suspendus. Au-delà de son image carte postale, c’est la densité de ses histoires, la surprise cachée dans les détails d’une porte ancienne, la vitalité d’une vie locale préservée qui font toute sa différence. Pour comprendre vraiment ce quartier, il faut parfois sortir des sentiers battus, demander à un habitant la signification d’une pierre gravée, ou simplement prendre le temps de savourer, depuis le chemin de ronde, la douceur incomparable de la lumière sur la vallée.

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